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Décret 24 juillet 2019 accessibilité numérique : à quoi faut-il s’attendre ?

Par Moïse Akbaraly, le 2 août 2019 à 10:18

Il aura fallu trois ans pour voir ce décret devenir une réalité, il y a dans ce décret de réelles avancées et des espoirs déçus.

Alors, que prévoit le décret du 24 juillet 2019 sur l’accessibilité numérique ? À qui s’adresse-t-il ? Quel est le délai pour mettre en place les dispositions générales nécessaires ? Mais surtout, quelles sont les sanctions applicables et comment les éviter ? Voici toutes nos réponses à ces questions.

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Que nous dit le décret ?

Le décret n° 2019-768 du 24 juillet 2019 veut un accès équitable des services de communication au public en ligne.

Cette initiative veut que tout le monde puisse accéder facilement aux informations numériques, en particulier les personnes souffrant de déficience physique, sensorielle ou cognitive ainsi que les seniors.

 

Quels sont les bénéfices de l’accessibilité numérique ?

Les avantages de l’accessibilité web sont légion. Pour en tirer profit, il faut que les ressources numériques soient à portée de main de tout le monde. Une démarche qui contribue à élargir l’audience d’un site web et, qui plus est, d'améliorer son référencement.

De nombreux défis se présentent, mais l’utilisation judicieuse des technologies d’assistance offre de nombreuses possibilités d’action. Par exemple, repenser l’ergonomie du site pour rendre la navigation agréable et diminuer le taux de rebond.

Pour tout dire, l’accessibilité aux personnes en situation de handicap, est un concept qui ne doit pas être pris à la légère si vous voulez optimiser la rentabilité de vos activités en ligne.

 

Décret d'accessibilité : à qui s'adresse-t-il ?

Par ce décret, la loi étend l’obligation d’accessibilité au secteur privé, notamment les entreprises générant un chiffre d’affaires annuel de 250 millions d’euros (réalisés en France et calculés sur la moyenne des trois dernières années).

Au moins 500 entreprises françaises doivent créer un registre d’accessibilité et rendre leurs sites 100 % accessibles pour favoriser la communication publique en ligne. On peut déjà estimer à quelques dizaines de milliers le nombre de sites web, extranet, intranet, applications métiers et autres applications mobiles concernées.

Ce seuil élevé de chiffre d’affaires exonère de facto, tout un pan de l’économie digitale à respecter les standards d’accessibilité aux personnes handicapées. Restons optimiste je reste convaincu qu’il s’agit d’un début et que ce seuil sera amené à baisser dans le futur afin de démocratiser ce droit universel.

Rappelons que les établissements publics, indépendamment de leurs chiffres d’affaires, doivent également se mettre en conformité.

Quid des petites structures ? En raison des exigences accrues en matière d’accessibilité handicap, il faut s’attendre à l’exécution de futurs décrets d’application pour répondre aux enjeux qui en découlent.

Conformité obligatoire dès cet automne

Image d'illustration de la conformité obligatoire

La parution du décret du 24 juillet 2019 relatif au registre public d’accessibilité a fait couler beaucoup d’encre et il faudra se conformer aux obligations dès début octobre.

Les sites créés à partir du 1er octobre 2019 doivent impérativement répondre aux exigences du référentiel à compter de cette date. Et pour les sites créés avant le 1er octobre 2019, ils devront l'être dès octobre 2020.

Délai prolongé pour les applications mobiles, progiciels et mobilier urbain numérique, jusqu'au 1er juillet 2021, selon les cas de figure. Une décision paradoxale en cette ère de mobilité, où la navigation sur smartphone bat son plein.

Quelles sont les sanctions possibles ?

En cas de défaut de conformité aux exigences, les sociétés concernées risquent une amende fixée à 20 000 euros annuel. Les intéressées disposent d’un délai de trois mois pour présenter leurs observations, faire éventuellement une demande de dérogation et en justifier les raisons - délai prorogé de deux mois si nécessaire.

Il s’agit d’une vraie évolution, car ce décret introduit pour la première fois une sanction financière pour le non-respect des obligations d’accessibilité web numérique. Néanmoins, quelle déception au regard du montant de la sanction! Celle-ci n’est clairement pas suffisamment dissuasive.

On regrette que le législateur n’ait pas utilisé la même méthodologie que celle utilisée pour le RGPD à savoir un pourcentage du chiffre d’affaires comme sanction. Pourquoi ne pas mettre au même niveau la défense de nos données personnelles et le droit à tout individu à pouvoir accéder aux contenus et services proposés sur le web ?

Une délégation ministérielle (le ministre chargé des personnes handicapées et le ministre chargé du numérique) réalise un suivi annuel de la conformité des sites internet, intranet et extranet et des applications mobiles des personnes mentionnées aux 1° à 3° du I de l'article 47 de la loi handicap 2005.

Un rapport qui sera transféré à la Commission européenne à une date butoir fixée le 23 décembre 2021, puis tous les trois ans.

Bon à savoir !

Le défaut d’accessibilité des services numériques peut avoir de fâcheuses conséquences sur vos affaires. En effet, ne pas donner l'opportunité à tous d'avoir accès à vos ressources web tend fortement à vous couper d'une partie non négligeable de l'audience. 

Par conséquent, votre visibilité web en souffre et vous perdez automatiquement des cibles potentielles.

Comment se conformer au décret ?

Les jours sont comptés et il est grand temps de vérifier que tout est conforme sur votre site et les applications créées. Voici quelques points à considérer pour répondre aux normes accessibilité handicapés 2019.

Connaître les règles d’accessibilité

Favoriser l’accès

Avant tout, il faut savoir que la sanction s’applique en cas de manque d’accessibilité des sites et non à cause du manque d’accessibilité en soi.

Favoriser l’accès veut dire qu’il faut que tout le monde puisse utiliser l’outil numérique via tout type de dispositif :

  • Sites internet
  • Publications
  • Intranet
  • Extranet
  • Applications mobiles
  • Progiciels
  • Mobilier urbain numérique

Pour cela, il existe des référentiels comme le RGAA (Référentiel Général d’Amélioration de l’Accessibilité) pour mettre en conformité les produits numériques créés.

Informer/Rendre public

Voici les documents obligatoires qui attestent de l’accessibilité de sites internet :

  • Une déclaration d’accessibilité justifiant la mise en conformité au RGAA avec le niveau de conformité et des éléments expliquant la raison des non-conformités
  • Le niveau de conformité visible dès la page d'accueil
  • Un schéma pluriannuel de mise en accessibilité sur 3 ans + des plans d’actions annuels élaborés à partir du schéma pluriannuel

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Ces obligations sont une bonne nouvelle pour l’accessibilité web, les entreprises et collectivités sont dorénavant tenues d’adopter une stratégie de mise en conformité.

Les justifications doivent en toute transparence mentionner le degré de conformité aux règles d’accessibilité numérique.

Écouter/dialoguer

La dernière loi sur l’accessibilité numérique exige qu’un utilisateur en situation de handicap puisse revendiquer l’accès (en cas de manquements) et signaler le problème. Cela pour proposer la possibilité d’interagir avec le propriétaire du site et d’obtenir une solution adaptée.

Dans le cadre professionnel, l’employeur met tout en œuvre pour que les travailleurs handicapés puissent travailler dans les meilleures conditions d’accessibilité.

Image d'illustration sur la conformité au décret

Respecter les référentiels

Des référentiels, comme le RGAA (Référentiel Général d’Amélioration de l’Accessibilité), regroupent des critères spécifiques favorisant l’accessibilité des personnes handicapées au niveau des sites web et des supports numériques.

Il n’y a donc plus d’excuses : un certain nombre de dispositifs sont disponibles afin de mieux intégrer l'accessibilité dès la conception d'un projet web.

Rendre vos documents numériques accessibles aux personnes handicapées

Les publications publiées après le 23 septembre 2018 au format PDF ou autres formats bureautiques doivent être accessibles au sens du RGAA.

Il existe deux solutions pour être conforme :

L’accessibilité pour renforcer l’inclusion sociale des personnes handicapées. L’accessibilité d’un site concerne toutes formes de handicap ! De nombreuses solutions sont désormais à portée de main pour répondre aux enjeux qui en découlent.

Prenons le cas des déficients visuels (malvoyants et aveugles), qui peuvent avoir recours aux technologies d’assistance telles que les lecteurs d’écrans équipés de synthèse vocale et/ou afficheur braille pour lire les contenus en ligne.

Ce concept joue un rôle fondamental dans la dynamique d’inclusion et les campagnes de sensibilisation, créées conformément aux règles du référentiel général d’accessibilité.

Quelles sont les zones grises du décret ?

La charge disproportionnée

Le texte actuel du décret concernant la charge disproportionnée est comme suit :

« I. – La mise en accessibilité d’un ou plusieurs contenus ou fonctionnalités entraîne une charge disproportionnée au sens du II de l’article 47 de la loi du 11 février 2005 susvisée lorsque :

1° La taille, les ressources et la nature de l’organisme concerné ne lui permettent pas de l’assurer ;

2° L’estimation des avantages attendus pour les personnes handicapées de la mise en accessibilité est trop faible au regard de l’estimation des coûts pour l’organisme concerné, compte tenu de la fréquence et de la durée d’utilisation du service, ainsi que de l’importance du service rendu.

II. – Les contenus ou fonctionnalités qui ne sont pas rendus accessibles au titre de la charge disproportionnée prévue au I sont accompagnés, dans la mesure où cela est raisonnablement possible, d’une alternative accessible. »

On peut en déduire que selon la taille ou la nature de l'organisme concerné, ce dernier pourra alléguer la charge disproportionnée pour justifier le manquement aux obligations d'accessibilité. D'autant plus que les seuils n'ont pas été définis, la charge disproportionnée devient encore plus ambiguë.

Le point 2 demande encore davantage d’éclaircissements quant à l'estimation de cette charge disproportionnée, qui dépend des avantages attendus pour les personnes en situation de handicap et des coûts pour l’organisme.

Même chose concernant les paramètres « fréquence et durée d’utilisation du service » et « l’importance du service rendu ». Les questions restent entières !

Les exemptions

L'obligation d'accessibilité ne concerne pas les contenus suivants :

  • Les publications au format bureautique diffusées avant le 23 septembre 2018.
  • Les fichiers audio et vidéo préenregistrés publiés avant le 23 septembre 2020.
  • Les contenus aux formats audio et vidéo diffusés en direct.
  • Les cartes et les services de cartographie disponibles sur internet.
  • Les contenus de tiers non conçus par l'organisme concerné et où ce dernier n'a pas la main dessus.
  • Les pièces de collection patrimoniales dont la reproduction ne peut garantir une accessibilité totale pour les raisons suivantes :
  1. L'incompatibilité des règles d’accessibilité avec la préservation de la pièce concernée ou l'authenticité de la reproduction, notamment en matière de contraste.
  2. Le manque de moyens techniques et financiers servant à reproduire le texte de manuscrits ou d'autres pièces de collection patrimoniales en une version plus accessible.
  • Les publications, des intranets et extranets, diffusées avant le 23 septembre 2019.
  • Les contenus des sites internet et des applications mobiles ne présentant aucune utilité pour finaliser une démarche administrative active. Sont également inclus les documents qui n’ont pas été mis à jour ou modifiés après le 23 septembre 2019.

Le délai de mise en conformité

Le délai fixé par le décret à l’automne 2019 pour les sites internet est irréaliste ! Lors de notre précédente étude du niveau des sites corporate du SBF 120 en 2016, aucun d’eux n'atteignait le minimum requis par le RGAA. Il faudrait plusieurs mois / années pour atteindre une conformité des nouveaux sites concernés par le périmètre du décret.Nouveau call-to-action

Moïse Akbaraly

Moïse Akbaraly

Diplômé de l’ESC Rennes et de l’Open University, Moïse co-fonde Ipedis avec Jackir en 2006. Après une expérience à Londres dans la gestion d’actifs, Moïse reprend du service au sein d’Ipedis en 2012 pour diriger les équipes conseils et commerciales. Il accompagne au quotidien les clients pour améliorer l’accessibilité et faire bouger les lignes dans l’intérêt du plus grand nombre. Il réinvente la proposition de valeur pour ancrer l’accessibilité dans les enjeux d’aujourd’hui et demain. Co-fondateur et Directeur associé, il dirige les équipes Conseil, Marketing et Commerciale.

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